Wednesday 30 January 2013

Philippe Muray et l'homophobie


Je ne résiste pas au plaisir de reproduire ci-dessous in extenso une note  figurant à la page 586 du livre du merveilleux Philippe Muray, "Après l'Histoire", Tel Gallimard, 2000, sur laquelle je viens de tomber par hasard. Cette trouvaille tombe à pic aujourd'hui 29 janvier 2013, le jour où s'ouvrent précisément les débats à l'Assemblé Nationale sur le projet de loi instaurant le "mariage pour tous".


Ce texte a été écrit en novembre 1999, soit peu de temps après l'adoption de la loi sur le Pacs, et de façon prémonitoire, Muray ajoutait: "Vous avez avalé, en leur temps, et après avoir regimbé quelques minutes, les nouvelles techniques de fécondation assistée. Bientôt, vous souscrirez au clonage, qui vous fait tant criailler aujourd'hui. Et, comme vous digérez en ce moment le Pacs, demain vous acquiescerez aux familles homoparentales, à l’euthanasie obligatoire et à tout ce que nous ordonnerons au droit d'enregistrer en lui remontrant que le bon sens, déjà, l'approuve". Effectivement, 14 ans plus tard, nous y sommes.

Ce qui me parait particulièrement lucide, dans le texte de Muray, c'est le fait qu'aujourd'hui, l'intolérance a changé de camp. Il est totalement faux d'affirmer, comme le prétendent les partisans de la nouvelle loi, que l'homophobie menace, qu'on la retrouve s'exhibant sans honte dans la campagne menée actuellement par les opposants au mariage homosexuel. Je suis au contraire frappé par la modération des propos de ces opposants et par leur soucis d'éviter de renouveler les erreurs commises à l'époque du débat sur le Pacs. Bien sûr, on ne pourra jamais éviter que ne surgissent quelques groupes extrémistes, tels que les chrétiens intégristes de Civitas, mais la vérité oblige à reconnaitre qu'ils sont totalement minoritaires.

En revanche, tout le discours adopté par les pro-mariage gay consiste à disqualifier d'avance leurs opposants, en les accusant de ringardise, de conservatisme, d'homophobie, en parlant à leur propos de "droitisation" des esprits, ce qui est évidemment le pire des péchés. Une fois cette disqualification effectuée, il n'est même plus nécessaire de répondre aux arguments de ces opposants par d'autres arguments; on ne se situe pas sur le terrain du débat d'idées, on utilise l'invective pour exclure tout débat.

En ce sens, cette police de la pensée que nous annonçait Muray, et que continue de dénoncer Élisabeth Lévy, fonctionne avec une efficacité croissante. Tout ce qui n'est pas politiquement correct doit être impitoyablement pourchassé, dénoncé, et si possible pénalisé grâce à la multiplication de ces lois qui nous disent ce qu'est la vérité officielle et nous condamnent à de lourdes sanctions si nous disons autre chose que cette vérité.