Tuesday 19 February 2013

De l'égalité entre homos et hétéros

L'un des arguments les plus utilisés par les partisans du "mariage pour tous", est que c'est une question d'égalité: la loi actuelle, en interdisant aux seuls homosexuels l'accès au mariage, qui est autorisé à tous les autres, romprait ce principe d'égalité qui constitue l'une des valeurs centrales de notre république, et constituerait une discrimination insupportable à l'égard de la communauté gay. Et bien entendu, le rétablissement de l'égalité de tous, homos et hétéros, face au mariage, devrait logiquement s'accompagner d'une même égalité devant le "droit à l'enfant".

Il me semble qu'il y a là un raisonnement particulièrement pervers, qui révèle une conception complètement faussée des notions d'"égalité" et de "droit".

L'égalité, qui est l'un des trois termes de notre devise républicaine, est certainement l'une des valeurs auxquelles les français sont le plus viscéralement attachés; la Révolution Française, beaucoup plus que sur l'idéal de Liberté, fondamental dans la révolution américaine, s'est faite sur le rejet des privilèges dont bénéficiaient la noblesse et le clergé, et dont était exclu le reste de la population.

Il est donc d'une suprême habilité, de la part des partisans du mariage gay, de fonder leur revendication sur la valeur d'égalité. Qui, en France, pourrait s'afficher contre une telle revendication? Qui, sans paraître profondément rétrograde et homophobe, pourrait refuser aux seuls homosexuels un droit (à se marier) dont bénéficient tous les autres citoyens?

Tout d'abord, observons que ce droit ne leur est nullement refusé. Le code civil ne s'interroge pas sur les préférences sexuelles des candidats au mariage, et ouvre donc la possibilité de se marier à toute personne... à condition qu'elle se marie avec une personne du sexe opposé.

Mais surtout, il faut s'interroger sur la signification juridique, et au delà, philosophique, du concept d'égalité. En effet, celui-ci ne signifie pas que toute personne, quelque soit ses caractéristiques propres, ait le droit d'accéder à toute fonction ou d'exercer toute activité. En effet, certaines fonctions, certaines activités, exigent de la part de celui qui les exerce des qualités particulières, que tout le monde ne possède pas obligatoirement. C'est ainsi que des fonctions impliquant certaines caractéristiques physiques (taille minimum, degré d'acuité visuelle ou auditive etc.) peuvent être fermées aux personnes ne présentant pas ces caractéristiques, sans que cela constitue une discrimination violant le principe d'égalité. Le principe est donc qu'il doit exister une égalité entre toutes les personnes se trouvant dans des conditions identiques, mais que ce principe ne peut pas s'appliquer aux personnes ne remplissant pas ces conditions.

Toute la question est donc de savoir si deux personnes d'un même sexe remplissent les conditions nécessaires pour se marier, c'est à dire pour adhérer à une institution dont le but primordial est d'offrir un cadre juridique aux enfants nés de cette union.

On pourra tordre la réalité dans tous les sens, il n'en restera pas moins qu'un couple homosexuel ne remplira jamais les conditions nécessaires, puisque par nature ils n'ont pas la possibilité de "fabriquer" des enfants.

Il n'y a donc dans leur cas aucune rupture du principe d'égalité, aucune discrimination attentatoire à leurs droits. Il y a simplement la reconnaissance du fait qu'un couple d'homosexuel ne pourra jamais présenter l'une des qualités essentielles pour se marier: la faculté de procréer.

Quant au "droit à" avoir des enfants,  la question qui se pose avant tout est de savoir si ce droit existe.

Alors que les premières déclarations des droits de l'homme consacraient des "droits de" (droit de penser, d'exprimer ses opinions, droit de pratiquer la religion de son choix etc.), les déclarations plus récentes ont multiplié les "droits à": droit au logement, doit au travail, droit à la santé, à l'éducation, à la culture.

On peut d'ailleurs se poser quelques questions sur la multiplication de ces "droits à", qui se heurtent souvent au principe de réalité (qui, et avec quelles ressources, va les garantir?); cependant, quelque soient les excès commis en la matière, je n'ai jamais vu, dans aucune déclaration, exposé le droit à avoir des enfants.

Ce qui en revanche est garanti, notamment dans la Convention internationale sur les droits de l'enfant de 1989, c'est l'intérêt supérieur de l'enfant, qui doit prévaloir sur toute autre considération, y compris le désir que peut avoir un couple, hétéro ou homosexuel, d'avoir un enfant.

Ce  "droit à" avoir un enfant est donc une pure invention, et la puissance publique n'a aucune obligation de garantir ce prétendu droit à tous les couples qui ne parviennent pas à satisfaire leur désir de paternité (et encore moins de financer le coût qu'aura fatalement sa satisfaction).

Cela n’empêche évidemment pas tous ces couples qui ne parviennent pas à avoir des enfants par des voies naturelles, de développer des "stratégies de contournement" de la nature: adoption, procréation médicalement assistée, et dans certains pays, gestation pour autrui.

Toutes ces stratégies font qu'effectivement, actuellement, il existe un nombre (difficile à évaluer mais non négligeable) d'enfants qui grandissent et sont élevés par des couples homosexuels: cas par exemple de pères ou de mères qui, s'étant séparés de leur conjoint avec qui ils ont procréé leurs enfants, se mettent en couple avec une personne du même sexe et obtiennent la garde de leurs enfants; cas également d'adoption par des célibataires qui se sont bien gardés de révéler, au moment de l'adoption, qu'ils étaient homosexuels.

Il me parait donc légitime que la loi s'efforce de donner un statut à ces enfants, ainsi qu'au conjoint qui les a élevés avec son compagnon (sa compagne) et qui ne dispose actuellement d'aucun droit.

Cependant, une chose est que la loi prenne en compte ces situations de fait, et les règle dans l'intérêt supérieur de l'enfant, et une autre très différente est qu'elle autorise à ce que l'on place de façon délibérée des enfants dans une situation de fils ou fille d'un couple homosexuel.

En effet:
- ou bien il s'agira d'enfants adoptables, pour lesquels les organismes qui gèrent l'adoption reçoivent un nombre de candidatures, de couples hétéro ou homosexuels, très supérieur à celui d'enfants adoptables. Et dans ces conditions, on a du mal à imaginer que ces organismes puissent considérer que l'intérêt supérieur de l'enfant commande de choisir un couple homosexuel, de préférence à un couple hétérosexuel
- ou bien il s'agira d'enfants non nés,et qui n'ont aucune chance de naître tant que la loi n'autorisera pas l'intervention d'une tierce personne, de sexe opposé à celui du couple homosexuel, pour apporter la gamète manquante.

Et dans ce cas, l'enfant qui naîtra comme résultat de ces procréations médicalement assistées, cumulera un double handicap:
- celui de l'inconnue sur ses origines réelles. Car bien entendu, l'enfant ne sera pas dupe: il saura parfaitement que derrière ces deux hommes ou ces deux femmes qui seront, selon l'état-civil, ses parents, il y aura toujours une tierce personne, l'homme qui aura donné son sperme ou la femme qui aura loué son ventre. Faudra t'il alors lever l'anonymat actuellement en vigueur en France pour les dons de sperme? Faudra t'il inventer un état-civil encore plus baroque et contraire à la nature, dans lequel l'enfant aura non pas deux mais trois parents?
- celui qui, malgré les affirmations optimistes des partisans du mariage gay, frappera inévitablement l'enfant, dans ses années d'école, lorsqu'il lui faudra expliquer à ses camarades qu'il n'a pas, comme l'immense majorité d'entre eux, un papa et une maman, mais deux papas ou deux mamans. On nous dit que peu à peu cela deviendra parfaitement naturel, mais en attendant, que de moqueries, de sous-entendus...

C'est bien pourquoi je persiste à penser que, lorsque l'on est disposé à mettre de façon volontaire un enfant, qui n'a pas demandé à naître, dans une telle situation, on pense beaucoup plus à satisfaire la revendication idéologique d'une égalité absolue entre couples homosexuels et hétérosexuels, qu'à se préoccuper de l'intérêt authentique de cet enfant, comme nous l'ordonnent les traités internationaux souscrits par la France en matière de droit des enfants.